BOULE en concert : un disque qui balaie vingt ans de chansons

Le génial Cédrik Boulard alias Boule est de retour avec un album live qui reprend des titres sa carrière déjà longue de vingt ans. Entre les chansons, Boule distille ses fameux mini sketches à l’humour ravageur dont il a le secret. Car il n’est jamais question de nostalgie mais bien d’émotion brute et de sincérité désarmante. L’album s’appelle « Boule vide son sac en public ».
Le concert proposé ici a été enregistré au Trianon Transatlantique de Sotteville-lès-Rouen le 18 octobre 2024. La formule a succédé à trois années de tournée en solo de Boule. Il y est question de retrouvailles avec un trio complice et efficace. La contrebasse de Fabrice Lhomme, l’accordéon de Sonia Rekis et les percussions de Freddy Holleville encadrent délicatement les propos de l’artiste portés par sa voix si singulière. Sur scène, Boule alterne chansons marquantes et anecdotes croustillantes, coups de gueule intimes et envolées poétiques.
Chanteur décalé et séduisant, dandy poète et séducteur, Boule est un artisan des mots et un fier guitariste. Avec son univers particulier, à la fois dandy, tendre, charmeur, drôle, intense, Boule revisite ici ses meilleurs titres dont ceux issus, notamment, des albums « Henri-Désiré » et « Petit Fils de Fantômas ».

L’idée la plus originale de ce concert est sans doute l’interprétation d’une même histoire vécue par deux personnes. Si « Le poisson » décrit une histoire d’amour et de mort glaçante vue par l’assassin, c’est le point de vue de la victime qui est exposé dans « Le poison ».

Dès le début du spectacle, Boule ironise d’emblée sur le cheveu qu’il possède sur la langue. Question de faire une mise au point immédiate sur les commentaires éventuels à ce propos (« L’ours polaire »). Puis c’est la poésie qui émerge très vite dans la deuxième chanson : « Avion » (Appareil Volant Imitant L’Oiseau Naturel). Ensuite, ce qui frappe dans ces morceaux choisis par l’artiste, c’est l’étude de personnages et de personnalités reflétant la société dans laquelle nous vivons. « Percolateur » s’attarde sur l’histoire d’un homme de métier utile mais incompris. « Pied de coq et polyglotte » raconte l’histoire de deux personnes différentes qui ont l’opportunité de se rencontrer mais qui ne le font pas ! Adolescents bientôt adultes, « Rose et Adèle » vont se faire la belle… « Mélanie » a épousé un garçon charmant qui devient un mari violent faisant d’elle une femme battue. Mais, heureusement, l’histoire ne se termine pas trop mal… « Neuneuil » évoque un gars plutôt bagarreur qui avait un drôle de regard avec son œil de verre… Dans ses multiples tableaux dépeignant la vie des gens, l’artiste n’oublie pas les couples. Comme celui décrit dans « Les pizzas » où un passionné de photographie partage le quotidien d’une personne qui aime par dessus tout « bouffer des pizzas en tripotant don IPhone à la con » (avec, en prime, une traduction du refrain en japonais !). Ou celui, vieillissant, qui voit sa libido s’étioler au fil de son train-train quotidien (« Je ne touche plus »). Enfin, l’avenir de notre planète préoccupe aussi Boule qui affirme qu’il ne « reste à l’humanité que les dieux pour pleurer » (« C’est dommage ») et qui pense que ce sont les êtres humains qui sont responsables du déclin de notre planète : « Sur la même terre, tous les animaux respirent le même air et boivent la même eau » (« Le même air »).
L’épilogue du concert de Boule est consacré à une « réactualisation » d’une fable de Jean de La Fontaine : « Le loup et le chien ». On y comprend aisément que la richesse du vagabond est avant tout dans sa liberté et qu’elle est supérieure à celle du travailleur obligé de respecter une certaine discipline.

Tel est Boule qui, dans sa démarche artistique, semble profiter au maximum de la richesse du vagabond. En se créant un univers très personnel où j’ai pu déceler un humour, un phrasé, une voix et une poésie qui rappellent Vincent Baguian (« Le poisson ») mais aussi, musicalement et vocalement, Roger Riffard (« Rose et Adèle »). Sans oublier le petit côté Pierre Vassiliu dans « Le même air » et Ricet Barrier pour « Politesse et banalités ». Que de bonnes références !

Article rédigé par Daniel Barbieux (Passion Chanson) sur base de l’écoute de l’album et des informations communiquées par Xavier Chezleprêtre (Attitude).
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