MUET : un premier album électro avec des textes signifiants

Colin Vincent et Maxime Rouayroux ne sont pas des nouveaux venus dans le paysage musical français. Leur première expérience date de 2011 lorsqu’ils ont créé, à Montpellier, le groupe Volin. Douze ans plus tard, après de nombreuses aventures musicales, ils proposent un nouveau projet dont le nom seul interpelle déjà : « Muet ». Si les synthétiseurs sont toujours à la base de la création, une nouvelle option électroacoustique vient enrichir les compos qui soutiennent très bien les textes désormais existentialistes de Colin.

Composé durant la pandémie, le disque met ainsi en exergue la fragilité de la condition humaine face aux altérations de son environnement. Et le premier morceau de l’album, « Le pic de tout », illustre le point de basculement entre la période faste et insouciante de croissance énergétique et le déclin inévitable. Face au gouffre qui se profile, il devient nécessaire de délaisser les paradis artificiels pour se reconnecter à soi. Mais dans cette fable écologique où l’homme et l’environnement sont interdépendants, les intempéries, le vent, l’orage, la foudre, les flots, symbolisent autant d’obstacles dans le cheminement solitaire de l’être humain. (« Devant », « Les Sirènes »).

Pour nous emmener dans ce voyage inhabituel, le duo de musiciens explore un son frais, riche et puissant porté par des synthétiseurs analogiques. En février 2023, le groupe a sorti un EP, « Électrochoc » qui était un avant-goût de leur nouvel album.

Et pour nous permettre de faire connaissance avec l’univers de ce nouvel opus, Muet a choisi un titre du patrimoine de la chanson française : « Le Cinéma » de Claude Nougaro. On peut aimer, ou pas, cette reprise. Mais force est de constater que, dans cette nouvelle interprétation électro, le texte devient d’autant plus contemporain qu’il se replace parfaitement dans notre société du désir et de la quête de perfection.

Alors, que dire de cet album ? D’abord qu’il s’agit bien sûr de musique dite « électro » dans le sens le plus pur du terme. Mais que cette ambiance est aussi composée de textes signifiants. Loin d’un quelconque mutisme (Muet, vraiment ?), les deux musiciens s’inquiètent, dans l’ensemble, de la situation actuelle de notre planète. Le premier titre affirme déjà que « nous avons atteint les limites, le pic de tout » . Et on pense, évidemment, au réchauffement climatique. Mais pas que. Il y a aussi les intolérances, les populistes et les dictateurs de toutes sortes qui contraignent les populations : « C’est l’exil qui te tend la main » . (« Devant » ). Et puis il y a la surcharge d’informations, des millions, vraies ou fausses, qui nous inondent : « Qu’est-ce qu’on en retient ? » (« Mille mots » ). Alors, il faut « trouver une issue pour ne pas que je flanche » (« Electrochoc » ). Sous peine que tout s’écroule telle « la chute du Colosse oubliant que ses talons d’Achille étaient faits d’argile. »
Tout cela est raconté avec des phrasés influencés par Bashung (« Electrochoc » , « Les sirènes » ), Christophe (« Les sirènes » ) ou Eddy De Pretto et le Jérôme Minière de la première époque (« Mille mots » )…

Voilà un album étonnant. Original. Rare.
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Article rédigé par Daniel Barbieux (« Passion Chanson ») sur base de l’écoute de l’album et des informations communiquées notamment par Xavier Chezleprêtre.
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